L'émotion ce jeudi 5 mai 2011 était intense. Le "Chant des Marais" emplissait la cathédrale. Une foule innombrable....Tous ses amis, tous ceux qui l'aimaient....de nombreuses personnes sont venues alors qu'elles ne le connaissaient pas.....uniquement pour lui rendre hommage.
D'autres, depuis la cérémonie du 23 Avril, me demandaient ce qu'il avait vécu....Je répondais que personne ne pouvait l'imaginer....Et je pense que mes mots d'aujourd'hui seraient impuissants à décrire ces moments d'horreur absolue. Alors je vais laisser Monsieur Emile VINCENT l'exprimer lui-même :
......Ce camp de MAUTHAUSEN était une véritable forteresse, classé troisième catégorie, c'est-à-dire un des plus durs.
Tous les détenus furent amenés dans une grande cour, appelée "Appelplatz", surveillée en ses quatre coins par des sentinelles et des miradors. Chacun fut enregistré, immatriculé, douché, rasé et badigeonné avec une sorte de désinfectant, puis habillé de cet étrange vêtement aux rayures bleues semblables à un pyjama.
On les envoya ensuite en block de quarantaine, pour quelques temps, afin de s'initier à la vie du camp. Les blocks étaient vraiment complets, et on ne pouvait même plus dormir sur le dos. Chacun devait s'écraser toute la nuit sur son épaule.
Toutes ces opérations étaient supervisées par les kapos et les S.S. Les kapos, presque toujours déportés de droit commun, étaient très féroces. On dressait tous ces hommes pour tuer et "faire le ménage" au moindre prétexte. Ils n'avaient plus aucune notion de la valeur humaine. Pour eux, un détenu n'était pas un homme. C'était un numéro, une machine, une bête, moins encore un objet. Aveuglés par le pouvoir qui leur était délégué, ces fous avaient droit de vie et de mort sur ceux que les Nazis mettaient entre leurs mains. Capables de tuer un homme à coups de gourdin, simplement pour le plaisir de voir souffrir. Parfois, quand un déporté était surpris en flagrant délit de "sabotage", on lui appliquait le rituel des 25 ou 50 coups de "schlag". Pour les kapos, le "sabotage" était tout ce qui était contraire à la loi du camp : un déporté qui limait un bout de ferraille pour couper son pain, était considéré comme un saboteur. On le faisait alors mettre à genoux dans la boue, et la tête sur un tabouret. Maintenu par ses camarades, publiquement battu, il se relevait le dos ensanglanté, et en avait pour plusieurs semainesà se remettre, s'il ne mourait pas avant. Emile prenait conscience peu à peu qu'il était tombé dans un engrenage sans fin. On les traitait comme du bétail, il n'y avait plus de vrais hommes.....
La population du camp était répartie en catégories que distinguait un triangle de couleur cousu sur la poitrine : rouge pour les "politiques" (déportés de la Résistance, militants communistes), vert pour les criminels de droit commun, violet pour les objecteurs de conscience...Les nationalités étaient très diversifiées : les Espagnols dominaient par leur nombre, ce furent les premiers détenus arrivés au camp. Par la suite, ce fut sous les ordres d'Hitler que Pétain fit arrêter des communistes, des syndicalistes, des juifs....
La première chose que l'on fit apprendre à Emile Vincent, ce fut son numéro. Il fallait pouvoir le reconnaître et l'épeler en Allemand. Il se souvient encore de ce sinistre numéro : 60684.....
Il y a des êtres que l'on ne peut oublier et c'est le cas pour Monsieur Emile VINCENT.
Daniel MEINDRE
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